Les élections allemandes: les Bundeswahl de l'ennui
Affiche Electorale CDU - Vive la parité? Quand on voit comment l'Allemagne performe de ce côté là, ça me fait doucement rigoler. |
Affiches Electorales - dans l'ordre: Piraten Partei, die Grüne, die Linke. Voir la galerie complète avec explications (en allemand) |
Mais attention, vous ne trouverez aucune affiche du NPD sur les murs de Berlin et de Brandenbourg, la région ayant considéré ces affiches racistes et insultantes pour l'Association Sinti & Roma (sans blagues...)
Affiches Electorales - NPS - Avec du bleu à la place du noir et du jaune, on aurait l'impression d'avoir de belles affiches pour le FN |
- Côté "UMP allemande", la CDU nous vend du bonheur au goût de crêpes et de vent-dans-les-cheveux. Un papa aux dents trop blanches cuisine avec sa fille (ouais, la parité, youhou !), des slogans pour vanter la stabilité de l'Euro et plus de bonheur s'étalent un peu partout...(la série complète est dispo ici) "Jedes Familie ist anders" proclament les affiches de la CDU. Oui, donc, et les familles homoparentales, c'est du caca? Elles attendent toujours leur droit à se marier et à être reconnue à l'équivalent des autres familles... Et les 20% d'Allemands paupérisés par le Hartz IV, vous croyez qu'ils ont les moyens d'avoir du vent-dans-les-cheveux? Une campagne à l'effigie de l'action du gouvernement ces dernières années: rien de concret, rien de concret et rien de concret.
- A gauche, le SPD montre des Allemands angoissés par le quotidien, entre manque de place en Kita, manque de la sécurité financière d'un Mindestlohn, appauvrissement des Seniors et augmentation fulgurante des loyers. Une conception moins joyeuse de la réalité, et plus terre à terre quant aux demandes quotidiennes des Allemands. N'empêche que la dernière fois que le SPD s'est retrouvé aux commandes, ils ont pondu les lois Hartz IV à qui on doit l'appauvrissement de ces sus-nommés 20% d'Allemands, principalement des femmes, des immigrés, des moins de 25 ans et de plus de 60 ans. Hum... de gauche, vous dites?
Affiche Electorale SPD - Tous les coups sont bons, pendant les élections. Merkel a le dos large (au figuré comme au propre d'ailleurs) |
Quand on se lasse (pas) de chasser des fantômes
S., une amie franco-allemande, me racontait son enfance dans une école près de Cologne, et j'ai été sidérée de voir comme les écoles allemandes enseignaient la culpabilité dès le plus jeune âge "La première sortie scolaire a eu lieu dans un camp de concentration - à 5 ans ! Mes cousins français me racontaient leurs sorties au Parc Astérix, à la mer et au ski ! Ca avait l'air plus sympa d'être Français ! Et tout au long de ma scolarité, j'ai eu l'impression que le seul fait marquant de l'Histoire de mon pays, c'était l'extermination de 6 millions de gens. C'est en grandissant, et notamment en allant étudier en France, que j'ai vu que ma culture, c'était bien plus que ça."
La Seconde Guerre Mondiale exerce un charisme - négatif, certes, mais quand même un charisme - absolument hallucinant, rejetant Goethe, Bismark, Bach & compagnie au rang d'acteurs de second plan. Avouez que le mot "Hitler" est une des raisons pour lesquelles vous avez cliqué sur l'article ! Et vous comprenez quand je parle de charisme. Contrairement à ce qu'on aurait pu espérer, la disparition de la génération "nazie" n'a pas mis fin à cette obsession. Il n'y a eu qu'à voir la fréquentation du Deutsches Museum en 2010 et 2011 lors de son exposition sur Hitler et les Allemands, la première à parler du charisme d'Hitler et de l'engouement des Allemands pour le Führer : plus de 250 000 visiteurs en quatre mois, soit 3 fois plus qu'une expo "normale" temporaire. Les Allemands ont toujours besoin de comprendre. La question de la Shoah et de la responsabilité politique de l'ascension d'Hitler au pouvoir est une véritable obsession, et qui ressort au grès des campagnes électorales ou des événements politiques.
Berlin, d'ailleurs, la vend très bien aux touristes, la Seconde Guerre Mondiale, et certains d'entre eux ne trouvent rien d'étrange à demander où est-ce qu'ils peuvent "voir la Seconde Guerre Mondiale à Berlin". A Berlin, l'Histoire est en train de tourner au Disneyland malsain (j'en parlerai dans un article, un jour, de ce Disneyland de l'Histoire qu'est en train de devenir Berlin)
Nos sous (oui, je dis "nos", parce que je paye mes impôts en Allemagne) ne seraient-ils pas mieux utilisés à créer le futur de nos enfants au lieu de courir après une bande de petit vieux qui va de toute façon bientôt mourir? A être investi dans des programmes luttant contre la discrimination et facilitant l'intégration en général? Sans fixette sur ces groupes qui ont été massacrés pendant la Seconde Guerre Mondiale, mais en élargissant cela à tous les type de discrimination? A interdire les partis d'extrême-extrême droite? A être investi dans les systèmes d'intégration des étrangers, des handicapés, des trasexuels itoutikanti? A renforcer les politiques de prévention? Bref, à servir à des causes pour le bien général et non pour la conscience politique des années 30?
Attention, je ne parle pas d'oublier les horreurs des camps de concentration et de la dictature nazie ou d'ignorer le sort des victimes. Loin de là ! Mais dans tout traumatisme, il y a un moment où il faut comprendre que la vie continue. Je crois que ce temps est plus qu'arrivé en Allemagne. Pour qu'enfin le fantôme de la Seconde Guerre arrête d'hanter toutes les décisions prises (et surtout non-prises) et que les Allemands s'occupent de créer Demain au lieu de ressasser Hi(tl)er.
Allez, je vous laisse sur cette réflexion estivale très gaie. Ce sera la seule que je m'autoriserais cet été, et franchement, avec cette chaleur, c'est plus du courage, c'est de l'abnégation. Je retourne discuter jardin bio avec mes p'tits Allemands.