Cependant, et à moins d’être born and raised à Berlin, d’avoir donc le clubbing comme deuxième nature, le cœur accordé aux beats crachés par les murs d’enceints et une capacité d’endurance défiant les lois de la physique, pénétrer dans le Saint des Saints de la boîte de nuit peut requérir quelques ajustements personnels. Prenons un exemple. Disons que l’on vous a proposé un vrai « dimanche berlinois » : aller au Berghain, un dimanche (oui oui, répétons-le), à onze heures. Du matin. L’expérience, que vous pouvez qualifier de « quelque peu extrême » sans rougir ou craindre d’être traitée de topette (enfin… vous dîtes « extrême », le Berlinois de base dira « cool, j’avais rien prévu aujourd’hui ») mérite quelques précautions. Disons donc que vous acceptez. Voici un petit guide non exhaustif à perpétuellement compléter des bizarreries, drôleries et autres mots en –rie que vous pourrez rencontrer au Berghain.
L'art de kiffer la vibe au Berghain |
La file d’attente
Aaah la sacrosainte file d’attente du Berghain… L’avantage de vous y rendre un dimanche midi, comme ne manquera pas de vous le rappeler votre hôte/boyfriend/whatever, c’est qu’il n’y a (habituellement) pas (trop) de queue (remarque à laquelle vous pouvez répondre par un regard soit émerveillé, soit désespéré, soit exaspéré, au choix). En temps « normal », comptez donc une bonne demi-heure d’attente à trembler de froid et de peur de vous voir refuser l’accès (se faire recaler après trente minutes de trime par -5 degrés… No comment). Car le Berghain n’a pas la réputation de laisser n’importe quelles ouailles fouler son asphalte.
Le Berghain sous acide |
L’entrée du club
Les clubs berlinois, au contraire de beaucoup des boites parisiennes dont la pédanterie n’est plus à prouver et appliquant des critères d’élection d’une injustice à la limite de la légalité, n’ont pas pour habitude de sélectionner leur clientèle ; en somme tout le monde est bienvenu, à moins d’être vraiment trop soul, vraiment trop raide, ou vraiment trop les deux. Exception faite du Berghain. Le lieu est en effet présumé opérer une sélection drastique à son entrée, acceptée par tous : on est le meilleur club de l’univers et de Navarre ou on ne l’est pas. Forcément, la première fois que vous avez arpenté la zone industrielle désaffectée vous conduisant à l’Olympe a été l’occasion de vous lancer dans une féroce diatribe, votre hôte/boyfriend/whatever tentant de justifier cette politique. Car si vous êtes de Paris, vous avez sûrement déjà eu l’opportunité de vous confronter à la bêtise crasse du genre humain « physio » (l’occasion de placer ce genre de délicatesse dans la conversation : « mais mec redescends sur terre, bordel : t’es physio ! Ce n’est même pas un vrai métier, c’est une démonstration de force pathétique. T’as des comptes à régler avec ta mère ? Ton papa t’aimait un peu trop ? T’es eunuque ? »). Alors merde, vous n’avez pas déménagé pour être soumise aux mêmes conneries, ha ça non merci hein ! Le flegme allemand prenant quasiment toujours le pas sur l’exaspération, votre hôte/boyfriend/whatever vous répondra simplement, dans un haussement d’épaules où se lira néanmoins une pointe d’énervement, que ce-n’est-pas-la-même-chose-maintenant-tu-te-tais-on-est-à-l’entrée-s’il-te-plait-bordel. Et il aura pleinement raison.
Flyer du Berghain. Ca donne le ton. |
Les toilettes de la mort
Un conseil : si vous venez d’entrer dans le club (en d’autre termes : si vous êtes décemment sobre), et que vous vous demandez toujours ce que vous foutez dans un endroit pareil un dimanche à une heure de l’après-midi, fuyez les toilettes. Pour votre Salut. Le mieux serait sans aucun doute de ne jamais y mettre l’orteil, mais les lois de la biologie/physique-quantique/astronomie sont contre vous. Tout d’abord, il apparaît difficile de passer neuf heures sans devoir éventuellement se soulager (neuf heures, absolument : si vous accompagnez des Berlinois, n’espérez même pas quitter le Berghain avant. Et encore, neuf heures, c’est parce que vous aurez supplié, proposé une récompense en nature, menacé de faire un scandale (par exemple, de la rejouer « le mangeur de visage de L.A. » sur le DJ du Panorama Bar (la salle « topette » du Berghain, pour ceux qui ne connaîtraient pas) dont vous n’appréciez de toute façon pas la musique. En conclusion, on racontera sûrement qu’à l’instar de votre modèle, vous avez dû trop ingurgiter de substances illicites, « et voilà le résultat, ras le bol de ces dzalopeuries de tourissstes qui ne savent pas se tenir »), et fait semblant de vous évanouir (ou vous êtes vraiment évanouie. L’extase mystique ou l’alcool, on ne sait plus trop)). Ensuite, vous trouvez au paradis des clubs vous obligera à supporter une chaleur infernale ; vous allez devoir vous hydrater. Et puis bon, le Jäggermeister est à 5 euros.
Donc, et ce malgré les efforts herculéens déployés par votre périnée, vous voici aux toilettes. Après avoir poirotée un temps incommensurable, ça y’est, la cabine d’en face s’ouvre enfin ; pour laisser sortir une bonne dizaine de personnes. Vous ne vous posez même pas de question (vous avez dépassé ce cape il y treize minutes), vous vous ruez à l’intérieur. Et là, c’est le drame. Si vous avez vu Trainspotting, figurez-vous la scène des toilettes/de l’opium : vous aurez une description assez exacte du spectacle qui s’offre à vos yeux. D’où la nécessité absolue (à ce stade, invoquer Emmanuel et son impératif catégorique ne vous apparaît même plus excessif) d’être résolument soûle quand vous devrez vous rendre aufs Klo. Car sinon, répétons-le, à vous le remake de la Divine Comédie et de la traversée des neufs cercles de l’Enfer. Vous aurez envie de vomir, mais vous vous retiendrez car la simple éventualité de devoir rapprocher votre visage du trou des chiottes ou du sol vous dégoûtera à un point encore plus extrême que le fait de devoir ravaler votre petit-déjeuner. N’espérez même pas trouver du papier non utilisé. Votre corps devra être capable des pires contorsions pour espérer ressortir immaculé de cette épreuve. Et votre situation (en plus de votre numéro d’équilibriste) vous donnera sûrement envie de pleurer (« mais qu’est-ce que je fous ici dans ces chiottes abominables, un dimanche matin ??? Dieu, Bouddha, Maman, je veux rentrer !! »). Contre le Mal, Dionysos demeure votre plus précieux allié : si par mésaventure vous deviez vous rendre aux toilettes, allez y plus soûle qu’un irlandais en fin de Saint Patrick. Votre vision trouble ne percevra pas l’horreur du décor, et votre bonhomie naturelle grandement alimentée par la liqueur ne s’émouvra même pas
- d’éventuellement devoir récupérer votre portable dans le trou
- de voir un mec s’enfoncer une bouteille dans l’anus au-dessus de l’évier où vous vous apprêtiez à boire ; ça vous fera rire, et vous vous extasierez même quelques secondes sur le spectacle (pas trop longtemps non plus car votre bon sens pourrait revenir au galop).
La galerie photo
Certes, on n’y entre a priori pas comme dans un musé, mais le Berghain s’avère être un endroit assez remarquable, et disons-le, beau. Après tout, vous avez minimalement neuf heures à y passer, admirez donc comme la tôle industrielle de la façade trouvent de nombreux contrastes dans la lumière tamisée, les fleurs ornant les comptoirs ou les moulures de certains murs. Appréciez le bar non-fumeur, son allure de marbre et sa balançoire géante. Traînez autour du Panorama Bar, écroulez-vous sur les commodités de la conversation dissimulées dans les nombreuses alcôves. Bref, avant de partir assurez-vous d’avoir bien visité le club dans son ensemble (à part les Darkrooms. Ou alors c’est en votre âme et conscience et vous ne pourrez-vous en prendre qu’à vous-même si ça tourne mal), et particulièrement les sorties de secours. L’escalier est en effet orné de photographies noir et blanc prise par très talentueux M. Marquardt, qui s’avère être également le « physio » du Berghain, dont le visage tatoué et le sens de la sélection ont contribué à construire la légende du club.
Voilà pour aujourd’hui. Les anecdotes « très-drôles-sur-le-moment-mais-carrément-glauques-en-y-repensant » viendront plus tard, nous ne voudrions pas vous effrayer tout de suite. Le Berghain déploie un univers unique, où beauté et trash se mêlent jusqu’à se confondre. S’y perdre sans modération.
Julie de la Team Frenchie- retrouvez moi aussi sur facebook !
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punaise.. j'ai toujorus dit:
RépondreSupprimer"moi à Berlin, je veux tester le plus de boîtes possibles (parmi les meilleurs souvenirs, sans aucun doute le Wilder REnate.. mais faut que j'y retourne en semaine pour le labirynthe, malédiction!!!), mais je crois que je vais laisser de côté le Trésor et le Berghain".
Or............... damned, tu m'as vraiment donné envie d'y aller au Berghain là!!!-->j'attendrai peut-être que les températures se réchauffent un peu pour la file d'entrée, mais damned, là il faut que j'y aille vraiment avant de rentrer en france!
héhéhé, ravie que ça t'ai donné envie. Moi, j'avais plutôt l'impression que ça donnerait envie aux gens de fuir le Berghain...
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